Les autres gens du village
    
        Les Normand 
Ils sont quatre. Le père, Maurice, la mère, Lucie, la fille Mimi et le garçon Toto. Ne cherchez pas dans ce texte les prénoms véritables des enfants, car je ne les connais pas. Personne à Sigogne ne les appelle d’ailleurs autrement que Toto et Mimi! 
La famille Normand tient la boucherie sur la grande place. La mère Normand et Mimi sont à la boutique, le père Normand et Toto sont à Bigard, un lieu-dit «en bas» du village, sur la route de Courbillac, où ils ont une maison qui leur sert à tuer et préparer les bêtes destinées à la vente. 
Quand ils ne sont pas à Bigard ils sillonnent dans leur fourgon 
Citroën Type H les routes des communes environnantes, à la recherche de bêtes à acheter. En été c’est surtout le soir qu’on peut les rencontrer, assis sur les bornes devant chez eux, bavardant avec les gens qui passent.  
Maurice est diabétique, lourdement, et il a perdu tout son système pileux. Cela lui fait un drôle de visage lunaire, tout lisse et rond, mais pour lui comme pour les autres habitants du village qui ont un petit quelque chose de différent du physique habituel des gens, personne n’y fait réellement attention, pas même les enfants.
Maurice est économe de ses mots, mais ses mots sortent et frappent juste. À Sigogne les Normand sont parmi ceux qui ont le plus recours au patois. Si l’on veut comprendre leurs messages, il y a intérêt à le pratiquer un peu aussi ! Je n’ai pas de problème avec le patois. Je l’utilise spontanément comme ma langue vernaculaire, ce qui me vaut parfois quelques désagréments pour n’avoir pas toujours su faire de différences entre le Français et le Charentais.