FAMILLE  GOUBIN - POULAT                                                       
LA GUERRE DE 1914-1918   


    Ayant quitté Montreux le 11  juillet 1918, Gabriel Ange Goubin revint le 16 dans la caserne de Brest qui l’avait vu partir pour Maubeuge quatre ans plus tôt.
     Mais le voyage de retour vers la mère Patrie fut une nouvelle épreuve pour tous ces prisonniers qui pensaient que leur cauchemar touchait à sa fin, épreuve aussi inattendue que foudroyante, à cause du virus de la « grippe espagnole » qui trouva dans ces organismes affaiblis un terrain d‘élection idéal.
Aux dires de mon grand-père, la terrible maladie fit des dizaines de mort dans le train qui  le ramenait de Suisse. Et chaque arrêt dans les gares voyait débarquer son lot de morts et moribonds…
     Par bonheur, il arriva à Brest le 15 juillet sans avoir été touché.
     Il avait à ce moment-là 37 ans.
     Quelle logique voulut que l’on gardât ces anciens soldats en caserne après leur retour de captivité? Après l’armistice? À quoi pouvait-on bien les occuper? Je ne sais pas. Je n’ai jamais entendu évoquer cette période autour de moi, et je n’ai pas trouvé de documents qui permettent d’avoir des débuts de réponses, mais ce n’est que le 19 mars 1919 que mon grand-père fut renvoyé dans ses foyers et put retrouver son école de Kérouze…
     Dans quel état d’esprit pouvait-il être, rendu à la vie civile? Dans les documents de famille conservés par ma grand-mère d’abord, puis par mon père, j’ai découvert une lettre qui donne à ce sujet quelques pistes, et qui corrobore du même coup l’opinion selon laquelle les anciens prisonniers Français des camps allemands n’avaient pas été bien accueillis à leur retour en France.Je la reproduis ci-dessous, et ce sera la conclusion au travail que j’ai entrepris sur les années de guerre de mon grand-père
Gabriel Ange Goubin.

Brest le 6 mars 1919
Ma  chère petite femme.
Enfin, j’ai obtenu de pouvoir partir demain, j’espère que ça marchera vite et que je pourrai prendre le train de deux heures. Je serai donc à Quimper vers 6h et le samedi matin je fonce à la caserne. Si ça marche aussi vite là-bas je serai samedi soir dans tes bras et s’en sera fini de nos misères. Quelle fièvre! Je bous ici et trouve que les aiguilles de ma montre ne tournent pas vite et pourtant je t’assure qu’il n’est pas 6h½ toute la journée.
J’espère que tu as passé un bon moment à Quimper. Peut-être aurai-je une lettre de toi ce soir me racontant ton voyage. Hier soir je suis allé chez le docteur mais assez tard car en route j’ai r
encontré H. Le Gall qui a voulu à toute force me faire monter chez lui. Il est qq peu désabusé je crois et me






Enfin

Goubin gabriel Ange                 le retour en bretagne

disait qu’il allait se contenter de vivre  en paix, tranquille. Je lui ai répondu que j’avais exactement les mêmes intentions, ne me contentant que d’empêcher de me marcher sur la pointe des pieds *. Je suis arrivé chez Louis vers 7h/1/2. Là j’ai trouvé toute la famille réunie, on a parlé de choses et d’autres et pas un mot de la lettre. J’ai donc fait de même. À bon chat bon rat! Ton eau de Cologne est prête. Sois donc satisfaite. Pour tout le reste nous arrangerons cela en tapis noir et je t’embrasse pour ta peine. Mon coquin de fils ne m’a pas encore écrit. Je vais le savonner samedi.
Ce soir je vais aller faire mes adieux chez Mme Pomelet. Ils m’ont fait le promettre et sont vraiment charmants Mme Pomelet surtout. Je ne continue pas, nous aurons tout le temps de bien bavarder désormais et de bien nous aimer.
Un bon baiser bien doux en terminant,
     Gaby
(* C’est moi qui ai souligné)