FAMILLE  GOUBIN - POULAT                                                             
Goubin gabriel Ange                    guerre de 1914-1918

Dans quel état d’esprit peut-il bien être à ce moment-là ? Il n’est pas trop difficile de le deviner. Bien sûr quitter sa femme et son fils Gaby a dû être une très grosse épreuve, mais il fait beau et chaud, la ville est tellement fortifiée qu’elle paraît  imprenable, et chacun s’accorde à dire que de toute façon cette guerre ne durera qu’une
semaine ou deux…

1er août 1914 / 9 mars 1919…
4 ans, 7 mois, et 8 jours,

1681 jours de vie volée

À l’ordre de mobilisation générale, le 1er août 1914, Gabriel Ange Goubin (mon grand-père) a trente trois ans. Il est à Kerouze, petite école près du port de Brigneau, à Moëlan sur Mer, où il est instituteur depuis 1909. L’école est vide, tout le monde étant en vacances depuis quelque temps déjà. Les garçons de sa classe unique sont depuis un mois occupés à la ferme des parents pour certains, embarqués comme mousse sur l’une des nombreuses pinasses qui font la sardine ou les casiers dans les environs immédiats du port de Brigneau  pour d’autres.
La bande d’artistes parisiens qui vient passer l’été à Malachappe depuis plusieurs années maintenant est arrivée depuis longtemps, et mène grande vie à l’auberge de « la Mère Bacon »
*.

Incorporé au 2ème Régiment d’Infanterie Coloniale à Brest où il arrive le 3 août 1914, il est tout de suite détaché  au 32ème RIC qui vient d’être créé, et envoyé à Maubeuge, ville  fortifiée du Nord, située à quelques kilomètres de la Belgique, où il arrive vraisemblablement le 10 août. Il  est cantonné avec son régiment à Ferrière la Grande (*S1) , au sud de la ville .


Mon grand-père vit donc vraisemblablement sa situation avec sérénité, et il ne manque d’ailleurs pas, le 15 août, d’envoyer depuis Maubeuge un télégramme à sa femme pour la Sainte Marie (reçu au bureau de… Beg Morg à Brigneau!)…


          Cette sérénité ne tiendra pas bien longtemps, pas plus que les fortifications de la ville d’ailleurs…

Commencée réellement le 29 août, la bataille de Maubeuge sera de courte durée, et les Allemands ne mettront qu’une dizaine de jours pour prendre possession de la ville et obtenir la reddition de toutes les forces présentes (45000 hommes quand même) commandées par le Général Fournier.

Le 8 septembre 1914, la capitulation est matérialisée par un défilé des troupes prisonnières devant leur général défait (*S2)  
Puis pendant deux jours elles seront cantonnées sur place, entassées sans nourriture. Le 10 enfin, noyé au milieu de dizaines de milliers de camarades d’infortune, le sergent Gabriel Ange Goubin  quittera définitivement la ville pour prendre à pied d’abord, puis en wagons à bestiaux, la route des camps de prisonniers
(*S3).


Ballotté d’un bord à l’autre, transitant par Mannheim, il finit par être interné à Minden, camp de prisonniers situé en Allemagne. Ce camp fait partie de ceux dont les conditions de vie des prisonniers étaient réputées les plus difficiles. Mettant en avant le droit international et son grade de sergent, mon grand-père refuse de se soumettre au travail obligatoire.
En représailles il sera « muté » le 1
er mai 1915 au commando FR. K.IV du camp de prisonniers de Grodno, situé dans une zone de marais insalubres sur le front russe.


* Pierre Mac Orlan fait partie de la bande qui mène joyeuse vie « chez la Mère Bacon » . Il offre dans son roman « Les poissons morts », paru en 1917, une image de la mobilisation générale à Moëlan…

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