FAMILLE  GOUBIN - POULAT
A relater également l’excursion faite au phare de la Pointe Terres à Hyapajé, lieu où débarqua Cook lors de son passage à Tahiti et celle aux bains Loti sur la rivière de la Fontana.
Il n’y a, à Tahiti, ni animaux sauvages ni serpents, à peine quelques oiseaux. Ceci contribue pour une large part à y rendre le séjour agréable.
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Bora-Bora (Iles sous le vent)
Nous arrivons à Bora-Bora le 12 mai à 8 heures du matin après avoir reconnu sur la route le sud des Fidji, les îles nord des Tonga, les îles Seilly à la France ainsi que l’île Beinghausen. Nous voici de retour dans ces îles tropicales tant vantées par les navigateurs. Séjour enchanteur à bien des points de vue. Il n’y a à Bora-Bora que 3 européens : un instituteur, un gendarme et un commerçant. Les indigènes sont venus à bord vendre des fruits et des coquillages, mais le dernier jour ils sont venus en nombre pour visiter le bateau et rendre visite et hommage au Touamatoa comme ils appellent le commandant. Ils nous ont donné le spectacle d’une upa-upa, danse des îles de la Société. La race d’ici est la même que celle de Tahiti, polynésienne. Les mœurs sont les mêmes. Les hommes ne sont pas plus courageux et les femmes pas plus difficiles. Cependant, je ne sais pas si c’est l’habitude qui, comme on dit est une seconde nature, mais elles commencent à me paraître moins répugnantes, voire même affriolantes. M. Piot, l’apôtre de la repopulation, devrait bien réclamer pour que les bâtiments visitent plus souvent ces îles. Je crois que le nombre des naissances y gagnerait, car les officiers et matelots s’en sont donnés à gogo comme l’on dit, c’est un moyen de colonisation à essayer.
Raiatea (Iles sous le vent)
Partis de Bora-Bora le 16 mai à 6 heures du matin, nous sommes à Raiatea à 11 heures du même jour, après avoir roulé effroyablement durant 4 heures.
Raiatea, foyer de la dernière insurrection, et résidence de l’administrateur des Iles sous le vent, est un peu plus grande de Bora-Bora. Elle est desservie tous les mois par le Tayiumi, courrier de Nouvelle Zélande, et par une goélette à gazoline venant de Papeete tous les 15 jours. Il y existe quelques magasins presque tous tenus
par des Chinois. Les gens y sont affables comme dans tout l’archipel et les femmes ne le cèdent en rien à celles de Bora-Bora.
Nous quittons Raiatea le 18 à 1 heure de l’après-midi avec mauvais temps mais la rade étant peu sûre, il vaut mieux partir. Nous devons faire les tirs au large de Huahiné et être à Papeete demain matin.
Papeete (Tahiti – 2ème séjour)
Pauvre Papeete. Nous avons bien de la peine à le reconnaître ce charmant pays que nous avons laissé si riant et que nous retrouvons en ruines. Toutes les jolies cases ou farès, en termes de pays, qui bordaient la route du bord de l’eau, ont été démolies et emportées par les eaux. De Faré-Uta, charmant quartier, où se trouvaient les vestiges de ce qui fût l’arsenal il ne reste qu’une maison et le tas de briquettes de l’îlot Matota où se dressait un joli lazaret et où trouva la mort durant la sinistre nuit un bon camarade Jean Le Bolloch, on ne voit plus que quelques pilotis et un coin de terre de quelques mètres carrés où se dressent encore 3 ou 4 cocotiers, pauvre, pauvre pays ! Enfin on a déjà commencé à reconstruire. Il faut espérer que cela n’amènera qu’une crise passagère. La population est contente de nous voir arriver. Le « Catinat » est bien vu à Tahiti et les gens se plaignent tellement de leur gouvernement et de la « gelée »( ?) dont al conduite durant le cyclone fut des plus critiquables, paraît-il, que cela va leur faire diversion. Bref nous nous accostons comme la première fois le 19 à 11 heures du matin et l’après-midi je vais à terre. Je descends avec Dugué venu me souhaiter le bonjour à bord. Ma première visite est pour sa dame et de là chez M. Laguesse. Je rencontre tout un tas de personnes, contentes de revoir le Tou-Tou Tuamatua (cuisinier du commandant). Nous apportons à Tahiti la nouvelle de la catastrophe de San Francisco(*), que nous avons appris à Nouméa et qui plonge la colonie dans la consternation car San-Francisco est la tête de ravitaillement de Papeete.*
Nous ne devons rester ici qu’une dizaine de jours et en effet nous en repartons le 30 à 10 heures du matin pour les îles Marquises, Honolulu et San-Francisco).
J’emporte de Tahiti un meilleur souvenir que la première fois et malgré le peu de temps que nous y avons passé, les gens m’ont paru encore plus affables et je crois que l’on s’y habituerait très facilement. J’emporte aussi quelques photographies du cyclone, un chapeau que m’a fait une charmante vahiné, de la vanille et des coquilles d’huîtres perlières ou nacrées, cadeaux ramassis un peu de tous les côtés.
(*) Le mercredi 18 avril 1906 au matin, la ville de San Francisco est touchée par un terrible séisme, l’équipage du « Catinat » venait de quitter le port et annonce le premier la nouvelle aux populations des îles. Il y eût près de 3000 morts et 80% de la ville furent détruits.
Ces pages sont extraites du journal de Raymond Leseuil tel qu’il est présenté par JP Roche dans son blog
«
 Le prolétariat universel ». Merci à lui.
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Témoignage sur Tahiti en 1905_02 Témoignage sur Tahiti en 1905_03 Témoignage sur Tahiti en 1905_01